À mesure que la transition énergétique mondiale s’accélère, l’attention portée aux acteurs du pétrole et du gaz se fait plus intense. Notre dernière analyse médiatique du secteur de l’énergie passe en revue 12 mois de couverture presse et de conversations sur les réseaux sociaux autour de huit grandes marques mondiales — Shell, Pemex, ENI, ExxonMobil, TotalEnergies, Repsol, E.ON et Puma Energy — pour en tirer les principaux enseignements pour les professionnels de la communication.
1. Une fracture réputationnelle majeure : l’opinion publique est profondément polarisée
Grâce à Onclusive Social, nous avons analysé les grands thèmes qui structurent les discussions des consommateurs en ligne. Sur une période de 12 mois, notre étude met en lumière une division nette dans la perception des entreprises du secteur de l’énergie :
- La responsabilité climatique, première source de préoccupation (46 %) : Les consommateurs sont de plus en plus critiques vis-à-vis de l’impact environnemental des entreprises du secteur. Sur les réseaux sociaux, beaucoup remettent en question la sincérité des engagements « net zéro », surtout lorsqu’ils coïncident avec des investissements dans les énergies fossiles ou une opposition aux politiques climatiques. Ces critiques traduisent une attente croissante de mesures concrètes pour réduire les émissions et d’un véritable engagement en faveur des énergies renouvelables, comme le solaire, l’éolien ou l’hydrogène.
- Des solutions durables à forte valeur ajoutée (11 %) : Les consommateurs expriment un besoin croissant de solutions énergétiques durables, efficaces et accessibles. Ils attendent des entreprises multi-énergies qu’elles prennent le leadership en matière d’innovation, en proposant des alternatives fiables, abordables et respectueuses de l’environnement. Ces attentes traduisent une volonté de voir des engagements concrets, au-delà des discours de façade sur la transition énergétique.
- L’activisme gagne du terrain (7 %) Sur les réseaux sociaux (notamment X, TikTok ou Instagram) les critiques se doublent d’une mobilisation active. Les appels au boycott et les hashtags militants, comme ceux du mouvement #JustStopOil, se multiplient pour dénoncer les nouveaux projets liés au pétrole et au gaz. Ces prises de position reflètent une pression sociétale croissante en faveur d’un changement radical de cap.
- Des profits qui irritent (2 %) Une partie des discussions en ligne exprime une forte frustration face aux bénéfices records affichés par certaines compagnies pétrolières, alors que les consommateurs peinent à faire face à la hausse des prix de l’énergie. Ce décalage perçu entre profits des entreprises et difficultés des ménages alimente un sentiment d’injustice.
- Un soutien persistant à la sécurité énergétique (4 %) À l’inverse, de nombreux messages relayent l’idée que la production d’énergies fossiles reste nécessaire pour garantir la sécurité énergétique et soutenir l’économie. Des références fréquentes à la politique « drill, baby, drill » de l’administration Trump témoignent d’un soutien assumé à l’exploitation pétrolière et gazière comme levier de stabilité des prix et de souveraineté énergétique.
2. Shell au cœur du débat médiatique
Notre analyse du Share of Voice révèle une présence médiatique écrasante de Shell parmi les marques étudiées :
- 7 millions de mentions sur les réseaux sociaux et 730 000 dans la presse sur 12 mois.
- Shell fait face à de nombreuses critiques pour son double discours : d’un côté, elle met en avant ses engagements environnementaux, de l’autre, elle poursuit d’importantes activités liées aux énergies fossiles.
- La marque déploie une stratégie de visibilité efficace sur les réseaux sociaux : en s’appuyant notamment sur des partenariats avec des influenceurs, devenus des vecteurs clés du débat public.
3. Investissements dans les énergies renouvelables : entre ambition et réalité
Les engagements en matière d’énergies renouvelables sont plus que jamais scrutés de près. Si le solaire (34 %) et l’éolien (29 %) dominent les conversations, l’hydrogène vert et bleu émerge comme la troisième technologie la plus discutée (19 %).
Derrière ces chiffres, des stratégies de transition contrastées se dessinent parmi les grands acteurs du secteur :
- TotalEnergies affiche un leadership affirmé en diversifiant ses investissements dans le solaire, l’éolien, la bioénergie, l’hydrogène ou encore le stockage. Exemple emblématique : son projet de batteries à 160 millions de dollars en Allemagne.
- Shell revoit ses priorités : l’entreprise réduit ses investissements dans les renouvelables (éolien, solaire, biocarburants) pour recentrer ses efforts sur les énergies fossiles.
- ENI adopte une approche hybride : le groupe mise sur un modèle de filiales satellites (Enilive, Plenitude), qui lui permet d’attirer des financements externes tout en gardant la main.
- E.ON se démarque : sans activité pétrolière, le fournisseur d’énergie mise pleinement sur le développement des énergies renouvelables, notamment l’éolien, le solaire et les solutions de stockage.
4. Les politiques de Donald Trump bousculent le marché
Le contexte politique américain ajoute une couche de complexité au secteur :
- « Drill, Baby, Drill » : un slogan en décalage avec les réalités du marché
Malgré les annonces de janvier 2025 visant à relancer la production pétrolière, les entreprises demeurent prudentes. Elles privilégient la rentabilité à court terme plutôt qu’une hausse rapide des volumes. - Tensions commerciales et instabilité
Les nouveaux tarifs imposés par Donald Trump sur les produits chinois ont déclenché des mesures de rétorsion, réduisant les exportations de pétrole américain et alimentant l’incertitude sur les marchés.
Un pic de demande qui se rapproche
L’essor rapide des véhicules électriques renforce les prévisions d’un pic de demande pétrolière d’ici 2027, incitant les acteurs à repenser leurs stratégies à long terme.
5. Les médias mettent l’accent sur l’équilibre du secteur
Grâce aux solutions de veille média d’Onclusive, nous avons identifié trois thèmes principaux dans la couverture médiatique des entreprises énergétiques :
- Diversification et investissements dans les énergies renouvelables : 11% de la couverture se concentre sur les stratégies de transition des entreprises énergétiques, mettant en avant leurs initiatives pour intégrer les énergies renouvelables et diversifier leurs portefeuilles.
- Performance boursière et rendements pour les actionnaires : 9% de la couverture examine les résultats financiers des entreprises, mettant en lumière les relations avec les investisseurs et l’impact de leurs performances boursières.
- Impact de la déréglementation : 9% de la couverture se penche sur les effets des changements de politique sous l’administration Trump, en particulier sur les opérations des entreprises et leurs stratégies à long terme.
6. L’innovation technologique redéfinit les conversations du secteur
Le rapport met en évidence l’importance croissante de la technologie dans les opérations et la communication des entreprises énergétiques :
- L’IA et l’automatisation dominent les discussions technologiques (7%) : La couverture média place l’innovation technologique parmi les sujets les plus abordés, avec l’IA, l’automatisation, les drones et les applications de big data transformant les opérations du secteur.
- Les réseaux sociaux amplifient les narratives technologiques : Les entreprises utilisent les réseaux sociaux pour mettre en avant leurs innovations, avec des hashtags comme #energytransition (2% des mentions de ENI) et #sustainability (3% des mentions de TotalEnergies), liant les avancées technologiques aux objectifs globaux.
- Les partenariats stimulent la couverture de l’innovation (7%) : L’analyse médiatique révèle trois types de partenariats technologiques qui reçoivent une attention particulière :
- Partenariats industriels pour l’optimisation de la production et de la distribution
- Collaborations technologiques avec des entreprises spécialisées en IA et en analyses de données
- Alliances intersectorielles avec des entreprises spécialisées dans les technologies de batteries et de solutions de stockage
- Les technologies orientées vers le client gagnent du terrain : Les infrastructures de recharge pour véhicules électriques (2% des discussions sur les énergies renouvelables) et les systèmes de gestion intelligente de l’énergie sont des sujets fréquemment couverts dans les médias axés sur les consommateurs.
Conclusion
L’industrie de l’énergie fait face en 2025 à un paradoxe de réputation sans précédent : des bénéfices records en plein scepticisme public grandissant. Nos données montrent une industrie tiraillée entre la déréglementation de l’ère Trump et des attentes climatiques qui s’accélèrent, entre les demandes des actionnaires et les critiques des consommateurs.
Les communicants du secteur de l’énergie doivent dépasser les messages de durabilité superficiels et répondre aux 46% de conversations appelant à une véritable responsabilité climatique. Alors que les médias couvrent de plus en plus les stratégies de transition (11%) et la performance financière (9%), les entreprises qui utilisent le suivi en temps réel des sentiments et s’engagent de manière authentique avec leurs détracteurs gagneront la confiance du public et assureront leur résilience commerciale.